La première fois que je suis allée voir Alexandre Romanès, c'était pour lui soumettre une question qui me hantait personnellement : comment transmettre de nos jours une culture minoritaire ? Il m'a répondu, avec une sincérité douloureuse, qu'il considérait sa fille comme "l'une des dernières des Mohicans".
Je suis souvent revenue le voir, pour photographier le cirque et pour passer de longues heures sur leur campement hors du temps. Nous avons parlé de poésie, de théâtre, de son amitié avec Jean Genet, de ses discussions avec Jean Grosjean, Christian Bobin. Mais plus jamais de transmission.
"Mon arrière-grand père avait trois femmes et un ours.
Il disait : l'embêtant, c'est l'ours.
Avec ses trois femmes, sa ribambelle d'enfants, un cheval qui tirait sa petite caravane en bois et l'ours, attaché à l'arrière avec une chaine, il traversait l'Europe en long et en large."
Alexandre Romanès,
Un peuple de promeneurs, 1998.
Photographies réalisées sur le campement de la Porte de Champerret et de la Porte Maillot entre 2013 et 2018.